Contrat de travail apparent, contrat de travail fictif ?
RF Social n° 237 – février 2023
Comment caractériser une relation de travail salariée ? Qui, en cas de contentieux doit rapporter la preuve de ce statut ?
Quelle relation de travail ?
L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’ils ont donnée à leur convention, si elle existe, mais des conditions de fait dans lesquelles l’activité est exercée (cass. soc. 25 juin 2013, n° 12-13968, BC V n° 165). Pour rappel, le contrat de travail se définit par l’existence d’un lien de subordination permettant à l’employeur de donner des ordres et des directives relatives à l’exercice du travail, d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements (cass. ass. plén. 20 décembre 1996, n° 92-40641, BC plén. n° 10 ; cass. soc. 13 avril 2022, n° 20-14870 FSB) ou impliquant des contraintes en matière de temps de travail et de formation, des obligations de validation par un supérieur… (cass. soc. 14 décembre 2022, n° 22-12264 D). L’existence d’un contrat de travail peut poser question en particulier pour les personnes exerçant leur emploi avec une grande autonomie ou des postes à responsabilités dans l’entreprise et dont le lien de subordination sera contesté. L’argument est régulièrement soulevé dans le cadre de procédures collectives (notamment en cas de liquidation) par l’AGS et/ou le mandataire liquidateur pour ne pas prendre en charge ce collaborateur au même titre que les autres salariés.
Prouver le lien de subordination
Si le collaborateur rapporte la preuve de ce lien de subordination, le contrat de travail est caractérisé. Le collaborateur peut aussi invoquer l’existence d’un contrat de travail apparent résultant de la production d’un exemplaire de contrat de travail même non signé mentionnant l'existence d'une déclaration préalable à l'embauche (DPAE), la production de bulletins de salaires même si les salaires y figurant n’ont pas été encaissés… (cass. soc. 13 avril 2022, n° 20-23668 FD). En présence d’un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve (cass. soc. 6 juillet. 2016, n° 15-14971) dont le contrôle relève des juges du fond qui feront une appréciation in concreto des éléments qui leur sont soumis. La Cour de cassation a considéré comme fictif le contrat d’un « collaborateur » dont la réalité de la prestation de travail était douteuse, constatant qu’il avait travaillé sans recevoir de salaire durant 12 mois, sans saisir le juge du travail, aucune cotisation sociale ni DPAE n’ayant été régularisées, quand bien même ce collaborateur avait produit un contrat de travail tamponné et signé en tant que Directeur commercial, des bulletins de salaire, deux lettres de réclamation faites à son employeur pour non-paiement de ses salaires ainsi qu’une attestation pôle emploi suite à la rupture du contrat de travail (cass. soc. 1er décembre 2021, n° 20-17347 D).